Mercredi 22 juillet 2020, lors d’un débat sur la chaine d’information LCI, le député Millienne a tenu les propos suivants à l’égard d’une ancienne escort-girl, ayant accusé de viol le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin : « Cette jeune femme a un passé un peu trouble donc c’est pas non plus une oie blanche sortie d’un couvent. »
🚨Bruno Millienne (député MoDem)🚨
— BalanceTonMedia (@BalanceTonMedia) July 22, 2020
« Par 2 fois déjà la justice a donné raison à Gérald Darmanin et puis d’après ce que dit la presse, cette jeune femme a un passé un peu trouble donc c’est pas non plus une oie blanche sortie d’un couvent » pic.twitter.com/9bT8KzdAUS
Ces propos sont profondément choquants car ils remettent en cause la crédibilité d’une femme simplement pour le fait d’avoir été travailleuse du sexe. Derrière ces propos, il y a un mythe : celui que les travailleuses du sexe ne peuvent pas être violées. Il y a aussi des représentations stigmatisantes, comme celles de femmes séductrices et manipulatrices, cupides, prêtes à mentir et détruire la réputation d’un homme par vénalité et appât du gain.
Il y a un deux poids, deux mesures, puisque tandis que les hommes auraient des « vies de jeunes hommes » pour justifier leurs comportements et excuser leurs « erreurs de jeunesse », les femmes auraient-elles un « passé un peu trouble » pour disqualifier leur parole à vie.
Ces propos reflètent malheureusement une constante de la culture du viol dans nos sociétés et des dysfonctionnements des systèmes judiciaires, policiers et médiatiques, à savoir que contrairement à la plupart des autres crimes, lorsqu’il s’agit de viol, on ne juge pas les faits, mais la réputation et la crédibilité de la plaignante.
Pour être innocentes et crues en tant que victimes de violences, les femmes sont donc censées devoir « sortir d’un couvent », en somme ne pas avoir de sexualité. Une femme qui n’appartiendrait pas à un seul homme, qui aurait une vie sexuelle active et indépendante pour elle-même, deviendrait alors un peu coupable, et devrait assumer une disponibilité sexuelle pour tous les hommes, avec le risque de s’exposer à des violences comme punition.
Dans ce contexte, les travailleuses du sexe obtiennent difficilement justice, alors même que des lois entravent leur accès au droit et à la protection. Rappelons par exemple, qu’à la suite d’une plainte, les travailleuses du sexe prennent le risque de se retrouver à la rue et de perdre leur appartement lorsque la police informe les propriétaires de leur activité.
Tant que les travailleuses du sexe ne seront pas crues, le doute persistera sur toutes les femmes, puisque toutes les femmes sont exposées au stigmate de putain. Nous demandons donc au MODEM de se désolidariser publiquement de ces propos et à Monsieur Millienne de s’en excuser.
Signataires
- Acceptess-T
- Act-up Paris
- Autres Regards
- BAAM
- Bus des Femmes
- Cabiria
- collectif Cagoules rouges Cagoules noires
- Cases Rebelles
- CLAQ – Comité de Libération et Autonomie Queer
- les Dévalideuses
- Fédération Parapluie Rouge
- Grisélidis
- Collectif Irrécupérables
- Nta Rajel
- les Mains Paillettes
- les Ourses à plumes
- Paloma
- Queer Auvergne
- STRASS – Syndicat du Travail Sexuel